Chaque décideur public ou privé est soumis à l’injonction d’anticipation. Il s’agit de prendre en compte les changements afin de s’adapter à une situation future porteuse d’opportunités et génératrice de menaces. L’intelligence économique s’intéresse à l’anticipation de type stratégique. Comment le chef d’entreprise va pouvoir préparer le développement de projets en fonction du positionnement des autres acteurs, mais aussi des changements perceptibles dans l’environnement (marché, technologie, normes…) ?
Dans le premier cas, il faudra recadrer sa conduite en fonction des actions de quelqu’un (concurrent, fournisseur, client…) qui cherche lui aussi à maximiser ses profits. On est dans la configuration du joueur d’échecs qui doit décoder la stratégie de l’adversaire pour jouer ses propres coups. Les économistes ont modélisé ces phases dans la théorie des jeux sous la forme de jeux à somme nulle (lorsque l’un gagne, l’autre perd) ou de jeux à somme non nulle (lorsque gains et pertes des acteurs augmentent).
Dans le second cas, l’anticipation se pratique à partir de la lecture des changements globaux. Il faut alors être capable de décoder les évolutions profondes de l’environnement économique. On cherchera une nouvelle technologie susceptible de remplacer un produit par substitution. On sondera le marché pour connaître les nouvelles tendances marketing portées par les clients. On analysera l’impact des futures réglementations européennes pour intégrer l’émergence de normes nouvelles. A ce stade, seule une compréhension fine des situations permet de lire des signaux faibles annonciateurs de grands changements. Dans cette phase, il faudra disposer des bonnes informations au bon moment pour prendre la bonne décision. Bien sûr, l’intuition du chef d’entreprise demeure primordiale, mais elle doit reposer sur une connaissance sans faille du marché.
Jacques Breillat
Article paru le 27-06-2008 dans APS N°1631 – Les clefs de l’intelligence économique