Sourd avec de grandes oreilles

L’affaire Snowden continue de défrayer la chronique et certains commentateurs paraissent découvrir les pratiques offensives et illégales des Etats en matière de renseignement. Le phénomène n’est pourtant pas nouveau. Depuis la chute du mur de Berlin, nous vivons dans un système international multipolaire dans lequel les facteurs de puissance sont devenus essentiellement économiques et financiers. Pour certains Etats, la «guerre économique » autorise la mobilisation et l’utilisation de moyens illégaux, naguère exclusivement dédiés au domaine de l’espionnage militaire. La prédation d’innovations technologiques, l’élaboration des standards normatifs et les écoutes en matière de négociation commerciale ne font que traduire concrètement ce repositionnement des Etats et la reconversion des services de renseignement. Par ailleurs, cette volonté de puissance des Etats est largement servie par les avancées technologiques. Il parait de plus en plus facile de tracer les échanges, d’intercepter les télécommunications et de détourner les données qui transitent sur le web.  Le programme secret nommé Bullrun permettrait même de décrypter tout ce qui est codé sur internet (y compris les transactions bancaires).
Pour autant, la dérivation des flux et le stockage des données ne suffisent pas à contrôler le monde. En effet, la quantité exponentielle de données demeure inintelligible sans de solides capacités d’analyse. L’interception massive de ces flux ne peut conduire le récepteur qu’à se noyer dans l’infobésité s’il n’est pas capable de traiter l’information captée. On peut donc disposer de belles et grandes oreilles et demeurer parfaitement sourd.  Dans le village planétaire, chaque citoyen se rassure ainsi comme il peut…

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