Les spécialistes de l’Intelligence économique, comme le Général Pichot-Duclos (Typologie de l’information, Intelco, 1994), classent l’information en trois groupes, selon son degré d’accessibilité : information blanche, information grise, et information noire (cf. la Préface du Général Pichot-Duclos, tirée de Typologie de l’information, Intelco, 1994).
- L’information blanche est une information à la fois publique et facilement accessible. Il s’agit d’une information totalement « ouverte », qui ne bénéficie d’aucune protection particulière. L’information blanche peut faire l’objet de recherches avec des outils grand public : chacun peut y accéder, la recueillir, la traiter et la diffuser. Cette information se base ainsi sur la matière dite « blanche » : publique ou réservée, elle est issue de bases de données, de publications scientifiques, de périodiques, de plaquettes d’entreprises, d’entretiens avec des experts de centres techniques, avec des partenaires, des fournisseurs, des clients… Elle est donc entièrement libre d’accès et d’exploitation.
- L’information grise, elle, ne fait pas l’objet de publicité et n’est pas aisément accessible. Cependant, on peut quand même y accéder, de façon indirecte ou détournée. Il s’agit d’une information sensible dont l’accès est légal, mais qui n’est pas publique en raison de sa valeur ajoutée. Ce type d’information est le produit d’un travail intellectuel ou d’une expertise. Il sera nécessaire d’utiliser des techniques avancées de recherche et de traitement de l’information pour obtenir ces informations (en participant à des réseaux relationnels, des groupes de discussion d’experts, etc.). La matière « grise« , sur laquelle s’appuie ce type d’informations, est essentiellement réservée. Elle est constituée d’informations qui, ayant de la valeur, ont fait l’objet d’une appropriation. Celle-ci se fait grâce à l’obtention d’un droit privatif (brevets, modèles, droits d’auteur…). Son exploitation est limitée, et généralement soumise à l’autorisation du titulaire.
- L’information noire est une information plus difficile à obtenir : elle fait l’objet d’une sécurisation particulière. Cette information est ainsi le plus souvent protégée par la loi, le secret professionnel ou les règles de protection contractuelles (clause de confidentialité). Elle est réservée aux seules personnes autorisées, qui auraient le « besoin d’en connaître ». Pour capter ces informations, on enfreint les règles du droit (espionnage industriel). La matière « noire » est confidentielle (les informations sont protégées par le secret). Il peut s’agir de différents types d’informations, comme les secrets de fabrication, les secrets commerciaux (études de marché, prévisions de vente), ou relatifs à l’organisation (organigramme),… Son accès est régulé, et soumis à des risques de sanctions civiles et pénales (vol, débauchage, corruption, etc.). Son exploitation est libre si on a droit à un accès légal (sauf copie servile ou agissements parasitaires).
J’ai eu l’occasion de dire combien la distinction entre information blanche, grise et noire demeure avant tout « conceptuelle ». Sur le plan pratique et opérationnel, elle pose des problèmes. D’abord elle semble évacuer la déontologie, en ne prenant en compte que le caractère légal ou illégal de la recherche de l’information. Le problème est que les informations grises, qui offrent une valeur ajoutée réelle pour l’Intelligence économique, sont à la frontière certes du légal et de l’illégal, mais aussi à celle du légitime et de l’illégitime. Il faudrait sans doute prendre en compte simultanément le légal et l’illégal, le moral et l’immoral, le légitime et l’illégitime (cf. Plus blanc que blanc). Ceci est d’autant plus difficile dans un contexte de faiblesse des idéologies et d’affaiblissement du sentiment religieux ; le simple rappel de la majesté de l’autorité de la loi ne suffit plus. Et ce encore plus dans le domaine de l’Intelligence économique, où des règles de déontologie précises n’ont pas encore vu le jour.
Références : – Pichot-Duclos, Général, Typologie de l’information, Intelco, 1994 et sa Préface ;
– blog Vtech ;
– Jacques Breillat, Plus blanc que blanc (cf. la présentation du document) ;
– le blog de Jacques Breillat, articles Blanc, gris ou noir ?, L’information ouverte n’est pas une information libre.