L’Intelligence économique est constituée de trois « piliers » : la veille, la protection des informations stratégiques et la gestion de l’influence (lobbying). Les techniques d’influence se sont profondément enrichies avec le développement de l’Internet, au point que certains auteurs n’hésitent plus à parler de « cyberlobbying ». Pour François Descheemaker, le cyberlobbying ou « e-lobbying » (on parle aussi de « lobbying on line ») est « la mise en œuvre des nouvelles technologies de l’information et de la communication et de leurs applications dans le cadre d’une campagne d’actions participant à une stratégie visant à exercer une influence sur un décideur public ». L’auteur défend l’idée selon laquelle nous serions passés du « lobbying classique » au cyberlobbying.
On peut s’interroger sur la spécificité de ce cyberlobbying. En effet, les méthodes d’influence dépendent toujours de l’état des techniques disponibles à une époque donnée. Et l’utilisation de ces méthodes est elle-même définie comme plus ou moins acceptable dans un contexte culturel situé. Dès lors, le champ du cyberlobbying ne fait qu’intégrer les outils disponibles via le Web. Chacun dispose finalement de ce que le politiste Charles Tilly appelle un « répertoire d’action », c’est-à-dire « les moyens établis que certains groupes utilisent afin d’avancer ou de défendre leurs intérêts ». Les actions de lobbying s’appuient sur les nouvelles potentialités d’Internet, de la même façon qu’en son temps d’autres actions avaient intégré la presse, l’affichage, la télévision… Il ne faudrait pas céder à la sidération de l’Internet. Finalement, nous sommes peut-être moins face à une forme nouvelle de lobbying qu’en face d’un renouvellement des techniques d’influence. Et Internet ne serait alors que le prolongement du lobbying « classique » par d’autres moyens…
Article paru dans APS, Les Clefs de l’IE