L’intelligence économique est souvent définie comme « la maitrise et la protection des informations stratégiques utiles aux décideurs publics et privés ». Personnellement, j’ai toujours eu beaucoup de d’interrogations par rapport à cette notion d’information « stratégique utile ».
En amont du processus stratégique, nous avons effectivement besoin d’éclairer la prise de décision. Parmi le flot d’informations collationnées, certaines vont alors nourrir directement la prise de décision et d’autres seront écartées comme non signifiantes. La plupart des informations ne prendront de la valeur qu’au terme d’un cycle de comparaison et de mise en perspective. Reconnaissons alors simplement qu’en amont, aucune information n’est « en soi » et « pour soi » jamais donnée comme stratégique. Elle ne pourra le devenir que par un processus de révélation, à l’issue d’une laborieuse phase de traitement et d’analyse par des experts.
Si nous nous situons sur le plan opérationnel, cette notion « d’information utile » ne nous éclaire pas vraiment beaucoup plus. Une information ne sera souvent considérée comme utile à un décideur, que si elle s’avère mobilisable. La labellisation de l’utilité d’une information reviendrait tautologiquement à reconnaitre a posteriori comme utile, toute information utilisable et utilisée par le décideur. Ce serait oublier que certaine informations utiles sont peuvent être négligées et passer inaperçues. Leur niveau de pertinence et leur valeur de signal faible sont carrément sous-estimés. Un filtre décisionnel n’est jamais infaillible. Il subit des altérations en fonction des effets de groupe, de la prégnance des stéréotypes, de la rigidité des schèmes culturels et des distorsions de perceptions. Et lorsque des informations utiles sont découvertes, il est parfois trop tard. Dans l’action, il s’agit toujours de donner la bonne information, à la bonne personne et au bon moment.